Interview : Ibrahim Maalouf

Grand concert : Ibrahim Maalouf et l’Orchestre Appassionato

C’est un formidable rendez-vous, en partenariat avec Est Ensemble, auquel il vous est proposé d’assister le 25 juin au stade Léo Lagrange. Le célèbre trompettiste, accompagné par cet ensemble musical de renom, sous la direction de Mathieu Herzog, jouera quelques extraits célèbres du répertoire classique. De passage au Festival de Cannes avant l’enregistrement d’une émission télévisée, Ibrahim Maalouf a accepté de répondre à nos questions.

 

Comment est née l’idée de ce concert avec l’Orchestre Appassionato ?

En fait, Mathieu Herzog, le chef d’orchestre, et ses musiciens m’ont invité pour ce projet. Dès qu’ils m’ont indiqué qu’il y avait de la musique classique, mais dans un cadre loin d’être guindé, ils m’ont convaincu. J’ai répondu présent ! C’est une manière d’ouvrir la musique classique à un public qui, peut-être, n’a pas l’habitude d’aller dans les grandes salles. De plus, comme je suis très attaché à la région parisienne, puisque j’ai enseigné au Conservatoire de La Courneuve-Aubervilliers pendant huit ans, ça m’a motivé. Forcément, venir à Bondy a complètement du sens pour moi. Ça me branche vraiment de revenir dans un département où j’ai officié, pendant pratiquement une décennie, avec beaucoup de plaisir, avec d’excellents souvenirs.

Estimez-vous que le répertoire classique est ouvert à toutes et à tous ?

Non ! Il faut être honnête, c’est loin d’être le cas. La manière dont on transmet cette culture n’est pas toujours adaptée pour l’ouvrir au plus grand nombre. Mais, dans un cadre comme celui de ce concert au stade Léo Lagrange, ça le fait ! Le répertoire qui est choisi, la manière avec laquelle les œuvres sont présentées, le contexte, fait que l’on pousse les murs. Pour ma part, je suis ravi de participer à une telle initiative.

Quel sera le programme de ce concert ?

Il y aura une pièce classique, que j’adore jouer, qui débutera le concert. Ensuite, il y aura des rappels pendant lesquels je vais interpréter des morceaux avec mon instrument. Des pièces moins classiques, issues de mes compositions, plus liées au répertoire que j’ai plus l’habitude de jouer. Avec Mathieu Herzog et avec l’équipe de l’organisation, on a échangé, discuté… Je leur ai proposé des choses, ils sont revenus vers moi avec des idées. On a trouvé un bon équilibre. Je tenais vraiment à jouer de la musique classique. Il y a toujours cette idée reçue que, comme je viens du jazz ou de la musique populaire, il faudrait du coup aller chercher uniquement ce répertoire. Le fait de montrer justement que je viens interpréter des œuvres classiques, cela prouve que nous ne sommes pas là pour faire que des choses « exotiques », mais nous souhaitons montrer que toutes les cultures sont liées. L’éducation musicale, ce n’est pas seulement tel ou tel style, c’est une philosophie globale. C’est comme l’identité, on ne vient pas que d’une seule culture. Le message de la musique doit être similaire. Le fait de mélanger de la musique classique avec d’autres univers, c’est important. Le croisement de cultures et de styles est intéressant et il faut l’exploiter.

Bondy est une ville multiculturelle, vous n’y êtes donc pas insensible ?

Si je devais faire un concert à l’opéra de Vienne, avec un public uniquement autrichien, devant un parterre d’aristocrates de 60 ans et plus, la trame de ce concert serait moins cohérente. Mais, à Bondy, toute culture est transmissible. Mon amour pour la musique classique, j’ai envie de le partager dans un concert comme celui-là. Puisque que je joue pour une population qui va écarquiller les yeux, en se disant : « Comment se fait-il qu’un mec qui s’appelle Ibrahim, qui est arabe d’origine, qui joue du jazz d’habitude, se met tout à coup à interpréter du Mahle. Quel est l’intérêt ? », ma motivation s’en trouve décuplée. Quand je fais un concert, je repense toujours à cette phrase entendue à mes débuts : quand tu es sur scène, il y a toujours une personne dans le public pour qui c’est le premier concert et une autre pour qui c’est le dernier. Il faut interpréter en ayant cette idée en tête. Selon moi, la personne pour qui c’est le premier concert, c’est fondamental de lui donner envie, parce que c’est comme ça que l’on peut potentiellement éveiller des vocations.

Vous aimez expérimenter certaines façons de travailler et ne pas rester dans le confort ?

Bien sûr, je me considère comme un chercheur. Que ce soit dans mes dix-sept albums, comme dans les musiques de film, quand je travaille pour des réalisateurs. C’est aussi une expérience lorsque j’écris une symphonie ou de la musique pour un concert. A chaque fois, j’essaie de vivre une expérience. C’est l’intérêt même de faire ce métier. Il faut toujours creuser, ne jamais se reposer sur ses acquis. Je déteste le côté « J’ai un truc qui marche, je vais exploiter à fond ce filon ! » D’ailleurs, mon manager s’arrache les cheveux. Depuis vingt ans, je ne fais que bouleverser ma façon de créer. Même quand un album a du succès et que le public est au rendez-vous, celui d’après est systématiquement différent.

Comment va se dérouler votre été, plutôt studieux avec des festivals ou ce sera plus détente ?

J’ai un programme chargé ! Je termine d’abord la musique du prochain film de Claude Lelouch. J’ai aussi deux tournées importantes, dont l’une avec mon guitariste. Une autre est liée à l’album que j’ai sorti il y a quelques mois, intitulé Capacity to love. Et je finis mon été les 28 et 29 juillet avec un évènement complètement fou. Je vais jouer au Hollywood Bowl de Los Angeles, pour l’anniversaire de Quincy Jones qui fête ses 90 ans. Lui est mon manager aux Etats-Unis. J’hallucine parce que je vais jouer avec tout le gratin de la musique, dans un contexte absolument dingue.

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