Latifa Oulkhouir, l’exigence et la droiture

Latifa Oulkhouir aime battre la campagne en ce début de 2020. Pas avec un coupe-vent et des pataugas au bord du canal, mais au téléphone et par mail. Elle suit avec intérêt les élections municipales, moment démocratique où les médias font vivre le débat d’idées. Passionnée de politique, elle a débuté en 2013 comme journaliste au Bondy Blog avant d’en prendre la tête. « Je me souviens de l’année, du mois mais pas du contenu de mon premier article et sa qualité ne devait pas être sensationnelle », lance-t-elle en souriant. « Je me reconnais complètement dans le Bondy Blog qui raconte l’actualité des quartiers populaires et l’actualité nationale vue de ces quartiers. » Elle n’a plus débranché, a appris en  marchant, a écrit sur des sujets qui la taraudent,  la politique, les chibanis, les inégalités sociales, les récits oubliés. Aussi sur des thèmes plus légers, la  grandeur et la décadence du Tiramisu par exemple… elle ne veut pas se cloisonner.

L’accélération a été rapide : « En 2014 j’ai couvert les élections municipales à Bordeaux, les attentats de Charlie Hebdo en 2015, et en 2016 je suis allée aux USA suivre la campagne de Trump. »

Droit, soutien scolaire et écriture

Une enfance à Cherbourg, un papa ou- vrier sur le chantier de La Hague, une maman à la maison, une ouverture sur  le monde, de belles discussions à table, la télé allumée sur le JT de 20 heures, beaucoup  de   lectures,   l’expérience de ses sept grandes-sœurs et grands- frères, tout était réuni pour faire de cette élève excellente en classe une citoyenne précoce. « J’ai toujours aimé écrire mais, comme beaucoup d’autres de mon milieu, je ne me sentais pas légitime et j’avais peur d’échouer. » On lui a conseillé de faire du droit. Après son bac littéraire et avec une bourse, Latifa s’est inscrite à l’université, à Nanterre. L’étudiante est aujourd’hui diplômée en droit public. Les deux pieds dans le ciment de la réalité, elle a fait du sou- tien scolaire à Zy’ Va, une association éducative. Elle était déjà connectée au site du Bondy Blog.

Bondy, pépinière de talent

Depuis janvier 2019, elle compose un tandem complémentaire avec Ilyes Ramdani, le rédacteur en chef. « C’est une manière de rendre au Bondy Blog ce qu’il m’a apporté, faire en sorte que ça ne disparaisse pas, poursuivre le travail d’éducation aux médias, continuer à for- mer des visages différents au métier de journaliste. » Et à Bondy toujours, qui l’héberge rue Salengro. « Il n’y a pas que des footballeurs, cette ville est une pépi- nière de talents à qui il faut donner leur chance. » Latifa Oulkhouir figure égale- ment dans le programme de l’Univer- sité populaire de Bondy où elle anime un cursus sur les médias et la représen- tation de la diversité sociale française. Bondy oui, mais Cuba aussi. Elle est fas- cinée par l’histoire, la culture, les habi- tants, les paradoxes de l’île crocodile.

« Les Cubains sont fraternels et ont un grand sens de l’humour, comme en ban- lieue. » Elle s’est rendue trois fois sur l’île en 2018 et il lui tarde d’y retourner. Mais après les élections municipales.